Charges Récupérables : Quelles Dépenses Peut-on Facturer au Locataire ?

Vous êtes propriétaire et vous vous demandez quelles dépenses vous pouvez légitimement facturer à votre locataire ? Ou peut-être êtes-vous locataire et vous souhaitez vérifier si les charges qui vous sont demandées sont bien conformes à la loi ? Dans tous les cas, comprendre ce que sont les charges récupérables est essentiel pour éviter les litiges et maintenir une relation saine entre bailleur et locataire.
Les charges récupérables, aussi appelées charges locatives, représentent l’ensemble des dépenses liées à l’usage du logement que le propriétaire peut légalement se faire rembourser par le locataire. Mais attention, toutes les dépenses ne sont pas concernées ! La législation française encadre strictement cette pratique pour protéger les locataires d’éventuels abus.
Dans cet article, nous allons explorer en détail quelles sont ces fameuses charges récupérables, comment elles sont calculées, et quelles sont les règles qui s’appliquent tant pour les logements vides que meublés. Vous découvrirez également les différences entre le système de provisions et celui du forfait, ainsi que vos droits en cas de régularisation tardive.
Prêt à faire le point sur cette question importante qui impacte votre budget logement ? Allons-y !
L’essentiel à retenir sur les charges récupérables
- Définition : Les charges récupérables sont des dépenses payées par le propriétaire mais qui peuvent être légalement refacturées au locataire
- Catégories : Elles concernent principalement l’entretien des parties communes, les services collectifs et certaines taxes locales
- Paiement : Possible par provisions mensuelles avec régularisation annuelle ou par forfait pour les logements meublés
- Justification : Le propriétaire doit fournir un décompte détaillé et tenir à disposition les justificatifs pendant 6 mois
- Prescription : Les charges impayées peuvent être réclamées pendant 3 ans par le propriétaire ou le locataire
Qu’est-ce qu’une charge récupérable ?
Les charges récupérables (ou charges locatives) représentent les dépenses que le propriétaire engage pour le compte du locataire et dont il peut obtenir le remboursement. Il s’agit essentiellement des frais liés à l’usage du logement et aux services dont bénéficie directement le locataire.
Pour faire simple, ces charges correspondent aux dépenses de fonctionnement et d’entretien courant que le bailleur paie initialement, mais que le locataire doit assumer puisqu’il profite directement des services correspondants. Le décret n°87-713 du 26 août 1987 fixe précisément la liste de ces charges, qui est limitative.
Il est important de distinguer les charges récupérables des charges non récupérables, qui restent à la charge exclusive du propriétaire. Ces dernières concernent généralement les grosses réparations, les travaux de mise aux normes ou d’amélioration du logement, ainsi que les frais liés à la propriété comme la taxe foncière.
Les charges récupérables varient selon que le logement soit loué vide ou meublé, et selon le type de bail. Nous verrons ces différences plus en détail dans les sections suivantes.
Liste exhaustive des charges récupérables pour un logement vide
Pour un logement loué vide avec un bail d’habitation, la liste des charges récupérables est strictement définie par la réglementation. Voici le détail de ce que le propriétaire peut légitimement facturer au locataire :
Ascenseurs et monte-charge
- L’électricité nécessaire au fonctionnement
- Les frais d’exploitation de l’appareil : visites périodiques, nettoyage, examen semestriel des câbles
- La fourniture de produits ou de petit matériel d’entretien : chiffons, graisses, huiles, lampes d’éclairage de la cabine
- Les menues réparations : changement des boutons d’envoi, paumelles de portes, ferme-portes, fusibles
À noter que le contrôle technique quinquennal imposé par la réglementation n’est pas une charge récupérable et reste à la charge du propriétaire.
Eau froide, eau chaude et chauffage collectif
- La consommation d’eau froide et chaude de l’ensemble des occupants
- L’eau nécessaire à l’entretien courant des parties communes, y compris la station d’épuration
- L’eau pour l’entretien des espaces extérieurs
- Les produits nécessaires à l’exploitation, à l’entretien et au traitement de l’eau
- La fourniture d’énergie, quelle que soit sa nature
- Les frais liés à l’exploitation des compteurs généraux et individuels
- L’entretien des épurateurs de fumée
- La réparation des fuites sur joints
Il est important de préciser que l’électricité utilisée par le locataire dans son logement n’entre pas dans cette catégorie. Chaque locataire doit souscrire son propre abonnement auprès d’un fournisseur d’électricité.
Installations individuelles
- L’entretien du chauffage et de la production d’eau chaude
- La distribution d’eau dans les parties privatives : contrôle des raccordements, réglage des débits et températures, dépannage, remplacement des joints des chasses d’eau
Parties communes intérieures
- L’électricité consommée dans les parties communes
- La fourniture des produits d’entretien : balais, sacs pour l’élimination des déchets, produits de désinsectisation et désinfection
- L’entretien de la minuterie, des tapis et des vide-ordures
- La réparation des appareils d’entretien de propreté comme l’aspirateur
- Les frais de personnel d’entretien
Espaces extérieurs
- L’entretien des voies de circulation et des aires de stationnement
- L’entretien des abords et des espaces verts
- L’entretien des équipements de jeux pour enfants
Taxes et redevances
- La taxe d’enlèvement des ordures ménagères
- La taxe de balayage
- La redevance d’assainissement
Personnel d’immeuble
Le salaire de l’employé d’immeuble, du gardien ou du concierge peut, sous certaines conditions, faire partie des charges récupérables. Dans un logement social (HLM par exemple), cette liste peut être complétée par des dépenses prévues dans un accord collectif.
Mode de paiement des charges pour un logement vide
Pour les logements vides, le paiement des charges récupérables s’effectue généralement par provisions avec une régularisation annuelle. Voici comment fonctionne ce système :
Le système de provisions mensuelles
Le propriétaire fixe un montant de provisions pour charges que le locataire verse chaque mois, en même temps que son loyer. Ce montant est déterminé en fonction du budget prévisionnel et des résultats des années précédentes.
Ces provisions correspondent à une avance que fait le locataire pour couvrir les dépenses que le propriétaire engage pour l’entretien et les services liés au logement. Le montant doit être raisonnable et proportionné aux charges réelles prévisibles.
Dans les immeubles équipés de dispositifs d’individualisation des frais de chauffage, de refroidissement ou d’eau chaude sanitaire avec télé-relevage, le propriétaire doit transmettre chaque mois au locataire les informations sur sa consommation.
La régularisation annuelle
Au moins une fois par an, le propriétaire doit procéder à une régularisation des charges. Cette opération consiste à comparer :
- Le total des provisions versées par le locataire
- Le montant des dépenses réellement engagées par le propriétaire pendant l’année
Si les provisions sont supérieures aux dépenses réelles, le propriétaire doit reverser le trop-perçu au locataire. À l’inverse, si les provisions sont inférieures aux dépenses réelles, le locataire devra payer un complément.
Cette régularisation doit être accompagnée de justificatifs. Un mois avant, le propriétaire doit communiquer :
- Le décompte des charges par nature (électricité, eau chaude, eau froide, ascenseur…)
- Le mode de répartition des charges entre les logements
- Une note d’information sur le mode de calcul des charges de chauffage et de production d’eau chaude collective, si nécessaire
Sur demande du locataire, le propriétaire doit transmettre le récapitulatif des charges du logement, par email ou par courrier. Durant les six mois suivant l’envoi du décompte, le propriétaire doit tenir à la disposition du locataire l’ensemble des documents justificatifs.
Dans le cas d’un immeuble où le contrat de fourniture d’eau n’est pas individualisé, le propriétaire doit transmettre une fois par an la facture d’eau et les informations sur la qualité de l’eau communiquées par la commune ou l’EPCI compétent (ou le syndic, pour les immeubles en copropriété).
Régularisation tardive et prescription
Le propriétaire dispose d’un délai de trois ans pour réclamer un impayé de charges. Par exemple, une dette de charges datant de mars 2023 peut être réclamée jusqu’en mars 2026. Ce même délai s’applique au locataire qui souhaite se faire rembourser un trop-versé.
La régularisation tardive est possible quelle qu’en soit la cause (oubli, ignorance, négligence). Toutefois, le juge des contentieux de la protection peut refuser un rappel de charges tardif s’il considère que ce rappel est déloyal, brutal ou consécutif à une faute du propriétaire dans l’exécution du bail.
Lorsque la régularisation n’a pas été effectuée avant la fin de l’année civile suivant l’année d’exigibilité des charges, le locataire peut exiger un paiement échelonné sur 12 mois. Pour cela, il doit envoyer une lettre au propriétaire par courrier recommandé avec accusé de réception.
Charges récupérables pour un logement meublé
Pour les logements meublés, la liste des charges récupérables est identique à celle des logements vides. Cependant, le mode de paiement peut différer selon le type de bail.
Bail mobilité
Dans le cadre d’un bail mobilité (contrat de location de 1 à 10 mois pour les personnes en formation, études, apprentissage, stage, service civique, mutation ou mission temporaire), les charges locatives sont obligatoirement payées sous forme d’un forfait. Ce montant forfaitaire est versé en même temps que le loyer et ne peut pas faire l’objet d’une régularisation.
Bail d’habitation meublé
Pour un bail d’habitation meublé classique, le contrat de location doit préciser si le paiement des charges s’effectue par forfait ou par provision :
Paiement par forfait
- Le montant du forfait doit être clairement indiqué dans le contrat de location
- Ce montant ne doit pas être disproportionné par rapport aux charges appliquées au précédent locataire
- Le forfait exclut tout complément ou régularisation ultérieure
- Il est payé en même temps que le loyer, selon la périodicité indiquée dans le bail
- Le montant peut être révisé annuellement dans les mêmes conditions que le loyer
Paiement par provision
Si le bail prévoit un paiement par provision, les règles sont identiques à celles applicables aux logements vides : provisions mensuelles et régularisation annuelle avec justificatifs à l’appui.
Cette option permet une plus grande transparence puisque le locataire ne paie que les charges réellement engagées par le propriétaire. Cependant, elle implique un suivi plus rigoureux et des démarches administratives supplémentaires pour le bailleur.
Comment distinguer les charges récupérables des charges non récupérables ?
La distinction entre charges récupérables et non récupérables est fondamentale pour éviter les conflits entre propriétaires et locataires. Voici comment les différencier :
Les charges non récupérables
Certaines charges restent obligatoirement à la charge du propriétaire et ne peuvent en aucun cas être imputées au locataire. Il s’agit principalement :
- Des grosses réparations mentionnées à l’article 606 du Code civil (murs porteurs, toiture, planchers, etc.)
- Des travaux d’amélioration ou de mise aux normes du logement
- De la taxe foncière et autres taxes liées à la propriété
- Des frais de gestion immobilière (honoraires d’agence, de syndic, etc.)
- Des assurances propriétaire non occupant (PNO)
- Des contrôles techniques obligatoires (diagnostic plomb, amiante, etc.)
- Du ravalement de façade et des grosses réparations dans les parties communes
Ces dépenses sont considérées comme inhérentes à la propriété du bien et doivent être assumées par le propriétaire, même s’il s’agit de charges liées à l’immeuble ou aux parties communes. Les frais de gestion de location restent également à sa charge.
Le cas particulier des réparations locatives
Il est important de ne pas confondre les charges récupérables avec les réparations locatives. Ces dernières concernent les petites réparations et l’entretien courant du logement que le locataire doit assumer directement (sans passer par le propriétaire), comme :
- Le remplacement des joints sanitaires
- Le débouchage des éviers et toilettes
- L’entretien des sols, murs et plafonds
- Le remplacement des ampoules et interrupteurs
- L’entretien de la chaudière individuelle
Ces réparations ne font pas partie des charges récupérables à proprement parler, puisqu’elles sont directement prises en charge par le locataire sans que le propriétaire n’avance les fonds.
Tableau récapitulatif : charges récupérables vs non récupérables
Charges récupérables | Charges non récupérables |
---|---|
Entretien des parties communes | Grosses réparations (art. 606 du Code civil) |
Petites réparations des équipements communs | Travaux d’amélioration et mise aux normes |
Consommation d’eau des parties communes | Travaux de ravalement de façade |
Chauffage et eau chaude collectifs | Assurance propriétaire non occupant |
Salaire du gardien (partie liée à l’entretien) | Honoraires de gestion (syndic, agence…) |
Taxe d’enlèvement des ordures ménagères | Taxe foncière |
Entretien des espaces verts | Contrôles techniques obligatoires |
Droits et recours du locataire concernant les charges récupérables
Face aux charges récupérables, le locataire dispose de plusieurs droits et moyens de recours pour se protéger d’éventuels abus.
Le droit à l’information et à la transparence
Le locataire a le droit d’être pleinement informé sur les charges qui lui sont facturées. En pratique, cela signifie que :
- Le propriétaire doit fournir un décompte détaillé des charges lors de la régularisation annuelle
- Sur demande, le locataire peut obtenir le récapitulatif des charges par email ou courrier
- Pendant six mois après l’envoi du décompte, le locataire peut consulter tous les justificatifs des dépenses
- Pour les immeubles équipés de dispositifs d’individualisation des consommations, le locataire doit recevoir mensuellement ses données de consommation
Le défaut d’information constitue un manquement du bailleur à ses obligations et peut justifier un recours de la part du locataire.
Contestation des charges
Si le locataire estime que certaines charges ne devraient pas lui être imputées, il peut les contester. Pour cela, il est recommandé de :
- Vérifier la conformité des charges avec la liste légale des charges récupérables
- Examiner les justificatifs fournis par le propriétaire
- Adresser une lettre recommandée au propriétaire pour contester les charges litigieuses
- En cas de désaccord persistant, saisir la commission départementale de conciliation
- En dernier recours, porter l’affaire devant le juge des contentieux de la protection
Il est important de noter que la contestation des charges ne dispense pas le locataire de les payer dans un premier temps, sauf décision contraire du juge.
Demande d’échelonnement en cas de régularisation tardive
Lorsque la régularisation des charges n’a pas été effectuée avant la fin de l’année civile suivant l’année d’exigibilité, le locataire peut demander un étalement du paiement sur 12 mois. Cette demande doit être faite par lettre recommandée avec accusé de réception.
Cette possibilité d’échelonnement constitue une protection importante pour le locataire face à une régularisation tardive qui pourrait représenter une somme importante à débourser en une seule fois.
En cas de difficultés financières pour régler les charges, le locataire peut également solliciter des délais de paiement auprès du propriétaire. Si la communication est difficile, le recours à un conciliateur de justice (service gratuit) peut aider à trouver une solution amiable.
Il faut souligner que les locataires qui souhaitent se prémunir contre les pièges de la location doivent être particulièrement vigilants sur la question des charges.
FAQ sur les charges récupérables
Quelle est la différence entre charges récupérables et charges déductibles ?
Les charges récupérables sont celles que le propriétaire peut refacturer au locataire selon la liste fixée par décret. Les charges déductibles concernent les dépenses que le propriétaire peut déduire de ses revenus fonciers dans sa déclaration fiscale. Certaines charges peuvent être à la fois récupérables auprès du locataire et déductibles fiscalement pour le propriétaire (comme la taxe d’enlèvement des ordures ménagères).
Comment sont calculées les charges récupérables dans un immeuble en copropriété ?
Dans un immeuble en copropriété, les charges récupérables sont d’abord réparties entre copropriétaires selon les tantièmes (millièmes) de chacun. Ensuite, chaque propriétaire peut répercuter sur son locataire la part des charges qui est légalement récupérable. La répartition entre locataires peut se faire selon la surface habitable, le nombre de personnes occupant le logement, ou par compteurs individuels pour l’eau et le chauffage.
Puis-je refuser de payer une régularisation de charges ?
Vous ne pouvez pas refuser de payer une régularisation de charges si celles-ci sont légitimes et justifiées. Toutefois, vous pouvez contester les charges que vous estimez indues en demandant des justificatifs et en adressant un courrier recommandé à votre propriétaire. En cas de régularisation tardive (après la fin de l’année civile suivant l’année d’exigibilité), vous pouvez demander un étalement du paiement sur 12 mois.
Le propriétaire est-il obligé de me fournir un décompte détaillé des charges ?
Oui, le propriétaire a l’obligation légale de vous fournir un décompte détaillé des charges lors de la régularisation annuelle. Ce document doit préciser la nature des charges, leur montant et leur mode de répartition. Sur demande, il doit également tenir à votre disposition tous les justificatifs pendant 6 mois après l’envoi du décompte.
Les frais d’agence immobilière sont-ils des charges récupérables ?
Non, les frais d’agence immobilière ou de gestion locative ne font pas partie des charges récupérables. Il s’agit de dépenses qui restent à la charge exclusive du propriétaire, car elles sont liées à la gestion de son bien et non à l’usage qu’en fait le locataire.
Peut-on modifier la liste des charges récupérables par accord entre propriétaire et locataire ?
Non, la liste des charges récupérables est fixée par décret et revêt un caractère d’ordre public. Cela signifie qu’aucun accord entre le propriétaire et le locataire ne peut modifier cette liste, même avec le consentement des deux parties. Toute clause du bail prévoyant des charges non récupérables à la charge du locataire serait réputée non écrite.
Que faire si mon propriétaire ne me communique jamais les justificatifs des charges ?
Si votre propriétaire ne vous communique pas les justificatifs des charges malgré votre demande, vous pouvez lui adresser une mise en demeure par lettre recommandée. En l’absence de réponse, vous pouvez saisir la commission départementale de conciliation ou le juge des contentieux de la protection. Le juge pourrait alors considérer que le propriétaire a manqué à ses obligations et ordonner le remboursement des provisions versées.